6 février 2013

Curlies au long cours 4

Étape belge...

(...) Deuxième mauvaise surprise à l'ouverture des portes de la remorque (ou van, comme disent nos amis outre-atlantique) : il est immonde. Il empeste l'urine, il n'y a ni litière ni foin et pratiquement aucune ventilation. J'essaie de rester calme, il est prévu de ne faire qu'un petit parcours pour se rendre à une écurie où les juments pourront enfin se délasser les jambes et s'allonger toute une nuit si elles le désirent.

Le fameux camion + remorque dans lesquels nous avons passé 13 heures !
 Les juments embarquent gentiment, malgré l'odeur... Elles sont vraiment formidables et adorables, je me désole d'avoir à leur imposer encore du transport, surtout dans de telles conditions. Elles sont fatiguées et je ne dois pas avoir l'air beaucoup mieux.

J'embarque dans le camion avec Vincent Van Loo, le propriétaire de la compagnie de transport internationale la meilleure d'Europe (est-ce que ma pointe de sarcasme est perceptible?) et son cousin Philip. Comme je ne parle pas plus flamand que néerlandais, il m'annonce dans son meilleur franglais que nous partons pour la Belgique, chez lui, où les juments passeront la nuit. J'ai un sursaut, si loin? Encore tant de route? Il me dit que c'est à 250 km et que, s'il n'y a pas de circulation, «on devrait y être en moins de trois heures», bien qu'il leur en ait fallu cinq pour se rendre à l'aéroport... J'avais oublié combien certains pays sont petits en Europe et qu'on peut les traverser en quelques heures. Mais mon coeur se serre en pensant aux pauvres cocottes dans leur van puant. D'autant que le chauffeur conduit comme s'il n'y avait pas de remorque en arrière ni de précieuse cargaison : vite, en changeant de voies, coups de frein et de volants. Je bouillonne intérieurement et je m'essaie à la diplomatie internationale en leur racontant le transport pour Toronto, la douceur de la conduite, les pauses, etc. J'explique comment j'ai été surprise de voir combien on ressentait tous les mouvements de volant lorsqu'on voyage dans la remorque avec les chevaux... Bref, j'y vais avec mes gros sabots (hollandais), côté subtilité, j'ai déjà fait mieux. Ils n'ont pas l'air de s'en faire et m'assurent qu'ils sont les meilleurs... Comme je n'y peut pas grand chose, je prends mon mal en patience et j'observe le paysage.

Ce que je retiens de ma traversée de la Hollande ? Des canaux, des éoliennes, des canards, des cygnes et des poules d'eau sur des tas de canaux et du brouillard, encore du brouillard. Avec l'unification de l'Europe, il n'y a plus d'arrêts aux postes frontières et nous nous retrouvons en Belgique. Vincent me dit qu'il habite au sud, à quinze minute de la frontière française, donc encore une grosse heure de route ! Pour une nord-américaine, il est difficile d'imaginer que l'on puisse traverser un pays en moins deux heures. Mais je suis ravie de la nouvelle. Comme nous ne faisons que de l'autoroute, je ne remarque pas grand chose de la Belgique, un autre pays que je n'ai pas encore visité. J'ai une pensée pour les gentilles personnes que j'y connais (elles sont quelques unes :o)) tout en réalisant que, Pirouette, la fille de Nymph, habite justement en Belgique!


Belgique, fin de journée, depuis l'écurie, vue sur un champ de... choux de Bruxelles ! Premier rayon de soleil depuis notre arrivée en Europe et le dernier pour les prochaines 24 heures.

Nous arrivons enfin chez Vincent. Le trajet s'est fait assez vite, finalement, et d'immenses boxes avec une bonne litière épaisse attendent les juments. De plus, le soleil fait une apparition et, pour une quinzaine de minutes, sa chaude lumière inonde la campagne belge. Je mets Nymph et Chumani dans le même box qui est bien assez grand pour les recevoir toutes les deux et Rosie obtient un box pour son bedon et elle. Je leur sers du foin sous l’œil soupçonneux de Vincent qui trouve que je leur en mets beaucoup. Je lui dis qu'il ne faut pas leur donner de grain et il semble étonné. En fait, de ce que je comprends, pour lui les chevaux sont tous pareils - ou doivent être tous pareils -, manger la même chose, se formater aux exigences des humains qui ne peuvent jamais avoir torts. Je pense qu'il aime ses chevaux, mais nous n'avons pas du tout la même philosophie... En remarquant que son foin est emballé, je lui demande si ses chevaux sont vaccinés contre le botulisme. Il répond évidement que oui et il ne lui vient pas à l'idée que les miens, ou tout autre en transit chez lui, ne le sont peut-être pas. Son foin pourrait donc les tuer... je tombe des nues, encore une fois. Pour des «hommes de chevaux», leur incompétence ou - pire - leur indifférence me sidèrent. Nous ne sommes pas de la même planète, c'est évident.

D'ailleurs, ils ont la même indifférence pour moi que pour mes chevaux. C'est peut-être aussi une sorte de timidité, ils ne savent pas bien quoi faire de moi, alors je suis transparente. Je m'assure qu'il y a bien une chambre d'hôtel réservée pour moi, pas trop loin. «Oui, oui... nous irons tout à l'heure», en attendant, il faut boire un café avec le maréchal-ferrant «le meilleur du pays», évidemment. Ils me font une petite place autour de la table. Manque de pot, à part du café et de l'eau, ils n'ont rien à m'offrir. Ce n'est pas grave. Aucune importance que cela fasse 36 heures que je suis debout et que je n'ai rien mangé depuis 12 heures. Il ne leur vient pas à l'esprit de s'en enquérir. Ils avaient leurs propres sandwiches dans le camion... ils n'ont donc pas faim tout de suite. La conversation roule en flamand, langue rocailleuse qui roule, grince et flute. En fait, maintenant que mes chevaux sont confortablement installés, la situation m'amuse plutôt, je pose sur la scène en regard de spectatrice. Ils ont des visages marqués, des mains caleuses et sales. D'ailleurs, l'endroit est plutôt malpropre. Vincent a un petit Jack Russell qui m'adopte, se pose sur mes genoux. Je le grattouille et il apprécie. La scène me donne envie de prendre des photos, mais je m'abstiens. Je ne suis pas certaine qu'ils apprécieraient.

Enfin, il est 16h30 et Philip est affamé, il y a tout d'un coup urgence de m'emmener à mon hôtel et qu'ils aillent souper. Je leur fait remarquer qu'il n'est pas encore 17 h, que c'est un peu tôt pour souper ? Non, non, il est même limite tard ! Ils m'embarquent dans le 4x4 sport de Vincent et en route pour l'hôtel. Vu la vitesse à laquelle Vincent négocie les petites routes de campagnes étroites et sinueuses, je crois qu'il pense que les panneaux de limite de vitesse sont uniquement pour les tracteurs. Je n'ai pas peur en voiture et j'aime la conduite sportive, mais sur les route appropriées... Je suis donc contente quand, en quelques minutes, nous arrivons au club de golf de Waregem qui fait aussi restaurant et hôtel. Comme c'est la morte-saison, le restaurant est fermé et je serai l'unique cliente de l'hôtel. Heureusement, le bar est ouvert et ils servent des repas. Il est à peine passé 17h et les seuls clients terminent leur repas au moment où je m'installe. C'est donc vrai qu'ils soupent si tôt en Belgique !

Il n'y a qu'un employé à l'hôtel et il est adorable. Il ne parle que flamand ou anglais, ce qui me surprend un peu dans un pays qui est censé être à moitié francophone... Il me concocte un bon repas de poisson et légumes, c'est parfaitement dans mes goûts. Quand il réalise que je quitterai l'hôtel à 4h30 (oui, oui, du matin), il me prépare un déjeuner à emporter : petits pains, jambon, jus de fruit, bouteille d'eau, fromage et, bien sûr, une gaufre belge ! J'apprécie l'attention et le remercie abondamment. De plus, il me permet de squatter son ordinateur afin que j'envoie un message à André.

Ensuite, je prends possession de ma chambre : douche et dodo, demain est un autre jour...

À suivre...

5 commentaires :

  1. Pfiouf ! Quelle expédition !!!
    On ne sait jamais à quoi s'attendre...

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  2. AAAAHHH! Isabelle. C'est ennuyant que toi et tes chevaux ayez eu un si mauvais traitement. Nous avons hâte que vous soyez rendus à destination et que vous puissiez enfin vous détendre.
    Bonne fin de voyage
    Louise

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  3. hé hé, quelle aventure !
    j'ai hâte de connaître la suite !
    Hélas, beaucoup d'"hommes de chevaux" sont effectivement totalement indifférents aux bien-être des animaux quel-qu’ils soient, cela vaut pour les chevaux, les bovins, etc.
    Bon, j'attends la suite, demain ?

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  4. Quand je suis allée en Belgique j'avais constaté que leur conduite était ... improvisée dirons nous mais je ne pensais pas qu'elle se pratiquait aussi avec camion et van !
    J'attends la suite (et fin) avec impatience !

    Manon

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  5. J'espère que la suite de ton expédition c'est mieux passée.Tout le monde n'a pas la même conception du bien-être....malheureusement.
    Camille

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